Introduction à la vie et à l'oeuvre de Claire d'Assise, fondatrice de l'Ordre des pauvres dames et première femme à avoir composé une réglementation de la vie religieuse à destination d'autres femmes. Sa vie est connue à travers les actes de son procès de canonisation, et sa mémoire entretenue par les témoignages de clarisses d'Allemagne, de France et d'Italie.
1/ En 2010, à l’occasion du viiie centenaire de la naissance du mouvement franciscain, la collection « Sources franciscaines » publiait la traduction française des sources concernant saint François d’Assise. Trois ans après seulement, c’est à Claire d’Assise, son âme sœur fondatrice de l’Ordre des pauvres dames, qu’est consacré un important volume collectif dirigé par Jacques Dalarun et Armelle Le Huërou sous le titre de Claire d’Assise. Écrits, Vies, Documents. Sur près de 1 100 pages distribuées en trois grandes sections, le volume renferme quelque 92 documents qui justifient qu’on puisse désormais le considérer comme le Totum clarien, pendant du Totum franciscain paru en 2010.
2/ Une première partie est baptisée sobrement « Claire d’Assise, écrits ». On sait que Claire d’Assise fut une pionnière dans la mesure où elle fut la première femme à composer une réglementation de la vie religieuse destinée à d’autres femmes, ses sœurs, une « forme de vie de l’ordre des sœurs pauvres » (même l’exceptionnelle Héloïse avait demandé à Abélard de rédiger la règle du Paraclet, sans s’y essayer elle-même). Outre cette Règle, elle laissa aussi son Testament, des Lettres, une Bénédiction et une prière, autant de textes rassemblés ici et qui formaient jusqu’alors la collection « canonique » des écrits de Claire : or cette collection se trouve augmentée d’un texte jusqu’alors cantonné dans le groupe des documents divers bien que riche d’enseignements, un acte de 1238 qui permet de mieux comprendre comment fut mis en œuvre le choix de la pauvreté dans la première communauté : comme l’affirme Jacques Dalarun, sans nul doute, ce texte aussi est bien de la première abbesse de Saint-Damien. Un des premiers mérites de ce recueil et de son organisation est donc de faire apparaître Claire comme un auteur à part entière, et de briser une fois pour toutes avec l’image d’une pâle réplique de saint François au féminin.
3/ Claire mourut en 1253 mais elle fut, de son vivant même, considérée comme sainte. C’est à cette dimension que nous introduit la seconde partie du volume, avec le dossier hagiographique intitulé « Un procès de sainteté ». Le procès de canonisation en constitue bien sûr la pièce maîtresse : outre qu’il fournit sur Claire des témoignages personnels, voire intimes, il retient particulièrement l’attention de tous ceux qui s’intéressent à l’histoire des rapports entre masculin et féminin au Moyen Âge en nous montrant la confrontation entre un tribunal exclusivement masculin et une communauté strictement féminine. Mais le lecteur découvre aussi des documents hagiographiques antérieurs ou postérieurs au procès, dont on sait entre autres qu’ils servirent de source à Thomas de Celano pour composer, entre 1255 et 1260, une Légende de sainte Claire vouée à une grande postérité. Cette légende et sa version en vers donneront naissance en effet à des légendes en langues vernaculaires qui constituent autant de reflets de la continuation de sa mémoire par des Clarisses, principalement en italien et en allemand, tout comme elles inspireront des chroniqueurs, des prédicateurs, voire des poètes comme Jacopone da Todi ou Dante.
4/ Une troisième partie dénommée « De Saint-Damien à l’Ordre de Sainte Claire », regroupe des documents éclairant la façon dont le projet institutionnel de monastères pauvres conçu par Claire se construisit d’abord avec le soutien de la papauté, avant d’évoluer selon les vœux de la hiérarchie ecclésiastique et non ceux de sa fondatrice. En d’autres termes, une tension se fit vite jour entre le vœu de préserver le message franciscain et les pressions de la hiérarchie pour ramener cette forme de vie féminine à des cadres monastiques traditionnels, et c’est en cela que l’on peut dire que le projet de Claire fut « remodelé par la papauté » en 70 ans à peine. On trouve donc ici, outre des écrits relatifs au monastère de Saint-Damien, toute une gamme de textes normatifs visant à encadrer la vie religieuse féminine d’inspiration franciscaine : l’« Ordre de sainte-Claire » qui finit par en émerger est somme toute bien éloigné du projet de pauvreté évangélique radical des origines et, en cela, la postérité du message de Claire, à savoir sa progressive déformation, a des affinités avec celle de François, mais pour de tout autres raisons. L’avant-dernier document reproduit ici, la Règle que le Pape Urbain IV imposa à l’ordre en 1263, le montre à l’envi, qui reflète à la fois une volonté d’unification et un fort désir d’encadrement et de clôt
Claire d'Assise
À l'occasion de la visite pontificale à Assise et à l'occasion d'une très belle nouvelle traduction de ses oeuvres parue au Cerf, je vous propose de parler de sainte Claire d'Assise. Compagne spirituelle de Saint François, elle se tient souvent dans son ombre alors que c'est une personnalité de tout premier plan. Autant François est passionné et un fol-en-christ, autant Claire est mesurée et sage ; autant il voyage beaucoup, autant elle reste cloîtrée à Assise ; l'un et l'autre sont pourtant convaincus selon le beau mot de Claire que " par la grâce de Dieu, l'âme de l'homme qui croit est plus grande que le ciel ". Alors qui était Claire d'Assise ? Qu'a-t-elle écrit ? Qui sont les clarisses ? Et quelle influence cette sainte a-t-elle aujourd'hui ? Pour en parler : Jacques Dalarun, historien médiéviste et Soeur Claire-Elisabeth, supérieure du Monastère des Clarisses de Poligny en Franche-Comté.
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