mardi 1 février 2022

Film - 3.5/5 - Les particules élémentaires 2006


Les Particules élémentaires (titre original : Elementarteilchen) est un film allemand réalisé par Oskar Roehler, sorti en 2006.


Il a été récompensé d'un Ours d'argent du meilleur acteur en 2006.



Le film est une adaptation libre du roman de Michel Houellebecq Les Particules élémentaires publié en 1998.

Michael et Bruno, demi-frères, ont des comportements diamétralement opposés. Ils se trouvent chacun devant la femme de leur vie, mais ces deux femmes tombent malades : vont-ils poursuivre la relation ou retourner à leur vie de solitaires ?...


 


Les romans de Michel Houellebecq sont-ils adaptables à l’écran ? Cette question existentielle, vous vous la posez autant que nous, puisque vous avez cliqué pour lire cet article. Avec cet adage qui vous trotte en tête, assénant que les bons romans font rarement des chefs-d’œuvre de cinéma. Comme ces livres de Balzac qui ont donné des téléfilms ronflants sur le service public, et contribuent surtout à ajouter une couche de poussière sur l’image des classiques de la littérature pourtant géniaux.


UN PRÉCÉDENT AU CINÉMA


Pour Houellebecq, il faut dire que l’expérience a déjà eu lieu. Il a d’abord lui-même réalisé « La possibilité d’une île » en 2008 (le roman est de 2005), avec Benoît Magimel. Un film à l’esthétique décalée avec des touches de science-fiction seventies, sur lequel la critique avait eu la main un peu lourde. Et puis l’adaptation d’Extension du domaine de la lutte en 1999, cinq ans après le roman. Qui ne restera pas dans les annales, mais se laissait volontiers regarder, avec un José Garcia plutôt bon dans le costume de l’informaticien raté.


Pour Les Particules élémentaires, il y avait déjà eu l’adaptation allemande d’Oskar Roehler en 2006. Le roman avait en effet rayonné outre-Rhin, où l’écrivain a vendu 200 000 exemplaires. On y découvre la satire culte du duo de demi-frères, Michel et Bruno, symboles biberonnés au Prozac de ce que la société moderne crée de solitude et de dépression individualistes. Cette fois-ci ce sont des Français qui s’y collent. Une fiction en deux épisodes de 60 minutes diffusée ce lundi 31 janvier à 21 h 10 sur France 2. À la réalisation ? Antoine Garceau, à qui on doit le succès de la série « Dix pour cent ». France Télé assume le côté « valorisation du patrimoine », dans la fiche de présentation du téléfilm : « Mettre en valeur notre patrimoine littéraire reste une des plus belles missions du service public. Dans cette perspective, adapter Michel Houellebecq est un pari audacieux pour la fiction de France Télévisions. »


BRUNO ET MICHEL

Le pari est-il réussi ? Si avant de la visionner, on accepte le principe qu’une adaptation télévisuelle d’un roman Houellebecq ne produira jamais l’effet dudit roman, on peut déjà plus librement répondre à la question. Ensuite, « Les Particules élémentaires » n’a pas plus de prétention que celle d'être un téléfilm, avec les moyens et l’esthétique service public ; et la touche plusbellelavisante qui va avec. Et dans ce contexte, Antoine Garceau s’en sort plutôt bien. Les passages de jeunesse de Bruno et Michel ne sont pas tellement prenants, et on met une bonne heure à entrer dans le téléfilm, mais l’atmosphère s’installe aisément une fois les quelques scènes dérangeantes retranscrites à l’écran, et l’arrivée définitive des personnages adultes, avec les très bons Guillaume Gouix et Jean-Charles Clichet (aux faux airs de Philippe Katerine), dans les rôles de Bruno et Michel.


Car retranscrire Houellebecq au cinéma consiste à partir d’emblée avec un handicap : raconter l’histoire de ses romans en se passant de cette petite voix off géniale qu’est le narrateur. D’ailleurs, les meilleures scènes des « Particules élémentaires » sont couronnées, justement, par une voix off qui lit des passages du roman pour mieux donner à contempler le triste destin des personnages. On découvre donc les trajectoires croisées de Michel et Bruno, livrés à eux-mêmes par Jeanine (Pascale Arbillot), leur mère irresponsable partie vivre la révolution sexuelle avec un groupe de hippies. Guillaume Gouix, avec son air de Monsieur Tout le monde, survole le casting dans le rôle de Bruno, prototype du raté houellebecquien. Fils d’un chirurgien idiot et hystérique – très bien joué par Patrick Mille – dont il a vu les prouesses sexuelles étant enfant. Assez pour le rendre obsédé, au point de se masturber frénétiquement, mettre la main sur le genou de ses élèves à l’âge adulte, finir muté à la commission des programmes, dépressif, accro au Prozac en quête de l’amour véritable dans des campings libertins.


DÉPRIME HIVERNALE ? ALLEZ-Y

Jean-Charles Clichet endosse plutôt bien le costume de Michel, docteur en biologie surdoué, dont les découvertes sur le clonage vont bouleverser l’humanité. L’air paumé, asexué mais amoureux d’Annabelle (Déborah François), qui elle aussi va prendre en pleine gueule le mur en béton de la vie. « Les Particules élémentaires » est diffusé un lundi soir, ce qui tombe bien, c’est le jour de la déprime. Ne luttez pas contre ce coup de mou hivernal qui vous rappelle que vous êtes nul, laissez-le vous envahir pour mieux comprendre que la misère des personnages raconte quelque chose de profondément humain.

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