Le temps a rendu justice à celui qui, longtemps considéré comme un fou,
fut l'immense poète, graveur et visionnaire que l'on sait, - éternel
enfant, éternel " primitif " que son ardeur imaginative, son lyrisme, sa
violence condamnèrent à n'avoir de renommée que posthume.
Autodidacte, il dénonce la raison tyrannique des philosophes, s'enflamme
pour la révolution. Ses admirations sont aussi significatives que ses
refus. Il préfigure quelques-unes des lignes de force du romantisme et
goûte certains de ses grands intercesseurs, Swedenborg, Shakespeare,
Dürer. Une vie intérieure puissante, une simplicité mystérieuse et
désarmante guide son bras. Dans Le Mariage du Ciel et de l'Enfer, il
proclame l'unité humaine, attaque la prudence et le calcul au nom de
l'épanouissement de l'être réconciliant désir, sagesse et raison.
L'amour comme la haine étant nécessaires à la vie, c'est le choc des
contraires qui provoque le surgissement de la force créatrice et la
progression de l'être individuel. Il oppose ainsi la raison à la vision
intuitive, à laquelle va sa préférence. " L'astre Blake étincelle dans
cette reculée région du ciel où brille aussi l'astre Lautréamont.
Lucifer radieux, ses rayons revêtent d'un éclat insolite les corps
misérables et glorieux de l'homme et de la femme ".
André Gide.
William Blake 1157-1827 est un peintre et un poète pré-romantique britannique.
Fils d'un bonnetier, il montre, dès l'enfance, d'étonnantes dispositions
pour le dessin et la poésie. Il est envoyé à dix ans dans une école de
dessin, où il compose ses premiers poèmes. Devenu élève du graveur James
Basire à quatorze ans, il est chargé de dessiner les antiquités de
l'abbaye de Westminster et des autres vieux édifices, milieux qui ne
manquent pas d'exercer une vive influence sur son imagination
mélancolique. Il grave de nombreuses illustrations pour livres d'après
Stothard et d'après ses propres dessins. Il participe, de manière très
impulsive, aux émeutes de 1780 devant la prison de Newgate, la bastille
londonienne.
Marié en 1783 selon ses goûts (il apprend à sa femme Catherine à lire, à
écrire, et à enluminer ses gravures), il songe à rendre par la plume et
le crayon les visions qui le hantaient. Un premier opuscule (1783),
contient ses poésies composées entre sa douzième et sa vingtième année.
Trop pauvre pour faire face aux frais d'impression de ses œuvres, il se
fait son propre éditeur et imagine d'y appliquer son écriture mise en
relief par la morsure sur des plaques de cuivre. Il publie ainsi "Les
Chants d'Innocence", ornés de ses dessins (1789), œuvre singulière, qui a
du succès, ce qui l'encourage à donner successivement, sous la même
forme: "Livre de prophétie" (1791) et "Les Chants d'Expérience" (1794).
En même temps, il fait figurer, à plusieurs expositions de l'Académie
royale, des peintures allégoriques, historiques et religieuses. Il
publie "Le mariage du Ciel et de l'Enfer", satire du "Du Ciel et de
l'Enfer" de Swedenborg, en 1790.
En 1797, il entreprend une édition illustrée par lui des "Nuits"
d'Young, qu'il laisse inachevée, puis il part vivre, à Felpham, auprès
du poète William Hayley, faisant des dessins pour celui-ci, et peignant
quelques portraits, et ne revient à Londres qu'au bout de trois ans. Sa
mort interrompt l’illustration de "La Divine Comédie" (1825-1827) de
Dante.
Bien que considéré comme peintre, il n'a en fait guère peint de tableaux
à l'huile, préférant l'aquarelle, le dessin, la gravure, la
lithographie et surtout la poésie. Il est l'auteur d'une œuvre inspirée
de visions bibliques à caractère prophétique. Son style halluciné est
très moderne et à part parmi ses pairs bien que ses thèmes soient très
classiques.
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