lundi 30 août 2021

Livre - La Montagne magique - Thomas Mann


 Un jeune homme, Hans Castorp, se rend de Hambourg, sa ville natale, à Davos, en Suisse, pour passer trois semaines auprès de son cousin en traitement dans un sanatorium. Pris dans l'engrenage étrange de la vie des "gens de là-haut" et subissant l'atmosphère envoûtante du sanatorium, Hans y séjournera sept ans, jusqu'au jour où la Grande Guerre, l'exorcisant, va le précipiter sur les champs de bataille.

Chef-d'œuvre de Thomas Mann, l'un des plus célèbres écrivains allemands de ce siècle, La Montagne magique est un roman miroir où l'on peut déchiffrer tous les grands thèmes de notre époque. Et c'est en même temps une admirable histoire aux personnages inoubliables que la lumière de la haute montagne éclaire jusqu'au fond d'eux-mêmes. 





La coproduction germano-franco-italienne montée par le réalisateur allemand Geissendorfer pour cette adaptation du roman de Thomas Mann ne connaîtra pas la postérité de Mort à Venise de Visconti. Honnête, voire scrupuleux, c'est un film intelligent, mais il prouve à quel point le cinéma peut être bête, parfois, par rapport à la littérature.

Que faire avec un tel volume ? Geissendorfer condense. Les trois premières semaines du séjour de Hans Castorp au sanatorium Berghof, au-dessus de Davos-Platz, qui prennent un quart du livre - et détachent le lecteur, avec le héros, du " pays ", - forment un cinquième du film, générique compris, soit une demi-heure elliptique. Le bon Joachim, malade rebelle et cousin de Hans, a ici un rôle minime.

 

 


Les récits se transforment en choses vues, et vice versa. La réminiscence capitale de la scène où le petit camarade Hippe prête son crayon est habilement placée en prologue, et le rapprochement établi par Hans avec la belle Mme Cauchat se fera tout seul, plus tard. Cette forme de déplacement se trouve ensuite essentiellement dans les dialogues, pour que toutes les informations, même dans le désordre, soient présentes. Ainsi de certaines remarques de l'Italien humaniste Settembrini et d'allusions sommaires à la famille du jeune Hans (il manque cependant son grand-père). Liant le tout, une voix off, discrète, trouve le juste ton du pédagogue pour mettre à distance le protagoniste principal.


Faute d'argent suisse, probablement, le réalisateur a laissé tomber les paysages magiques des Grisons pour s'en tenir à quelques plans d'une montagne standard. Il a aussi écarté les cigares avec lesquels Hans entretenait une relation suivie. Les personnages du livre, enfin, sont bien sûr triés et remodelés, avec quelque liberté, doit-on préciser : la florissante Maroussia est par trop hystérique.

Dans le détail, il y a une fidélité touchante, qui conduit Geissendorfer à respecter le pantalon à carreaux de Settembrini et à insister gravement sur le numéro 34 (chambre de Hans).

Dans l'ensemble, les rapports de Hans avec ses compatriotes d'" en haut " sont exacts, même raccourcis. Mise à part Marie-France Pisier, qui est (faute du metteur en scène) une Clawdia raide, bêcheuse, que l'on a eu tort de doubler puisque le modèle était russe et parlait allemand avec un accent prononcé, les acteurs sont judicieusement choisis. Christoph Eichhorn, malgré une névrose soulignée mal à propos, est bien ce " joli bourgeois ", cet enfant "simple et gâté par la vie " ; Hans Christian Blech est un docteur Behrens brutal à souhait, Rod Steiger un Peerperkom plausible, et Aznavour un Naphta correctement jésuite.

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