Indonésie, 1946. Johan est un jeune soldat néerlandais envoyé avec
cent mille autres aux Indes néerlandaises afin de rétablir l'ordre
pendant la guerre d'indépendance. Johan tombe progressivement sous
l'emprise du charismatique capitaine Westerling, surnommé le Turc.
Tandis que le conflit s'intensifie et que le Turc
fait peser une répression de plus en plus lourde sur la population
rebelle, Johan éprouve des difficultés croissantes à distinguer le bien
du mal.
Evoquant un pan méconnu dans l’Histoire des Pays-Bas, « De Oost » de Jim Taihuttu est un très bon traité de psychologie et un intéressant film de guerre dans lequel évolue un jeune casting concluant.
Porté par un Martijn Lakemeier d’une justesse incroyable et bluffant dans chacun de ses plans, le film nous emmène à l’Est et plus précisément en Indonésie, là où sont envoyés de jeunes soldats en quête d’aventures et enthousiastes par la démarche qui devrait être la leur.
En effet, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une partie de la jeunesse militaire néerlandaise embarque pour les Indes orientales, ancienne colonie occupée jusqu’il y a peu par les Japonais. Persuadés qu’ils seront accueillis en héros dans les îles et à leur retour de leur mission, nos téméraires soldats vont vite déchanter et découvrir la dureté de la vie dans les camps militaires mais aussi et surtout une réalité qui dépasse tous les entendements et va à jamais bouleverser leur existence.
SOS d'un soldat en détresse
« De oost » a pris le parti de faire des allers et venues dans la vie du jeune Johan de Vries et celle de sa troupe, nous replongeant dans les souvenirs d’une campagne qui l’a profondément marqué ou nous emmenant dans son quotidien post-traumatique qui a changé à jamais un homme altruiste en un employé dur et dénoué de toutes émotions.
C'est que, nous le constaterons par nous-mêmes, la mission pour laquelle s’était engagé le jeune Johan n’a rien d’élogieux. Celui qui, dans un premier temps, se faisait le défenseur de la population locale va peu à peu devenir un exécuteur sans pathos, une fois sous la coupe et l’emprise de Raymond Westerling (surnommé « Le turc »).
Vécue au plus proche de son personnage principal, cette incursion dans la campagne militaire de Johan va surtout nous permettre de comprendre comment celui-ci va arriver à son point de rupture, devenir un homme austère et un soldat renfermé. Tortures, exécutions, traumatismes vont révolutionner son monde utopique et le faire basculer du côté obscur, lui qui tentait tant bien que mal de se démarquer de ce père qui a jadis sympathisé avec l’occupant nazi.
A la fois film de guerre et thriller psychologique implacable, « De oost, des soldats et des ombres » est une mise en lumière intelligente d’une réalité que l’on découvre à travers les yeux clairs de jeunes soldats idéalistes et parfois immatures : l’ambiance au sein des campements, la perception du terrain et de la discipline imposée à de jeunes adulescents, la prostitution de jeunes filles locales mais aussi le mal du pays, les préjugés que l’on a sur une culture et sur le retour des héros, sont ainsi passés au crible dans un copieux drame de guerre dont on sort éprouvés, comme son héros principal.
La photographie sublime des décors exotiques contraste à merveille avec la noirceur des campements et des villages ravagés par l’ordre et la discipline, la soumission et les exécutions. L’alternance entre plans larges et rapprochés nous ouvrent vers d’autres horizons ou nos oppressent, c’est selon… et soutient le développement d’une paranoïa naissant dans la terreur et la barbarie et prenant toute son ampleur dans un quotidien que l’on parvient difficile à vivre tant l’empreinte du passé et de ses douloureux souvenirs écrase tout sur son passage.
Mêlant réalité et fiction, Histoire et récits personnels, « De Oost » offre une ouverture vers la réflexion et le devoir de mémoire, questionne un événement historique méconnu et se penche sur la dérive qu’entraînent certains choix moraux.
Bref, il offre un contenu dense qui nécessite d’être digéré une fois la vision du film terminée. |
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