Évoquer la question du viol au XVIIIe siècle, à travers une trentaine d’affaires à caractère sexuel (viols, séductions suivies de grossesses, harcèlement, sodomie), relève d’un pari osé. Pour y parvenir et se familiariser avec le déroulement des procédures criminelles, le présent ouvrage commence par redessiner les contours d’un système judiciaire complexe. Les procès étudiés croisent et interrogent ensuite des aspects plus ou moins tabous de la vie quotidienne à la fin de l’époque moderne : sexualité, violence, condition féminine, relations sociales, lien familial, règlement des conflits ou même la notion de genre. L’attention se porte enfin sur le destin des victimes et des accusés à la sortie du tribunal, entreprise jamais réalisée dans le cadre d’une recherche consacrée au viol. Le choix d’un angle monographique, qui vise un territoire allant de Sens à Auxerre, au cœur de l’actuel département de l’Yonne, contribue à une lecture moins désincarnée des affaires sexuelles à l’échelle du royaume au cours des dernières heures de l’Ancien Régime. Les sources variées a priori arides – archives criminelles et notariales anciennes, arrêts du parlement de Paris, registres paroissiaux et état civil – portent en filigrane un thème sensible qui véhicule de nombreuses idées reçues. Cette enquête, inédite et puissante, fait parler l'Histoire et dépoussière les préjugés qui pèsent sur les violences sexuelles au siècle des Lumières.
Crimes et violences sexuels au siècle des Lumières
Nous avons tendance à imaginer la société d’avant les années 1960 comme gangrenée par la patriarcat et dans laquelle les femmes n’auraient eu ni la parole, ni le droit à la justice… Qu’en était-il alors de la fin de l’Ancien Régime ? Contrairement aux idées reçues, les crimes sexuels et en particulier le viol n’étaient pas impunis et constituaient une faute morale et sociale grave. Comment étaient-ils alors jugés ? Punis ? Que devenaient les criminels et les victimes ? Quelles étaient leur répercussion sociale ? Si les traces qui nous en restent sont principalement judiciaires, l’étude du crime sexuel nous apprend beaucoup sur la société d’Ancien Régime sur sa structure, ses mentalités et sur son quotidien. Enora Peronneau Saint-Jalmes est invitée par Mari-Gwenn Carichon.
Notre invitée: Enora Peronneau Saint-Jalmes, archiviste paléographe (prom. 2020 de l’Ecole des Chartes), est lauréate de la première édition de la bourse Victor Baubet, lancée en 2020 par l’École et les Éditions Perrin. Elle publie dans ce cadre un ouvrage intitulé Crimes sexuels et société à la fin de l’Ancien Régime, aux Éditions Perrin.
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