Angoulême 2021 : « Albatros » le nouveau film poignant de Xavier Beauvois
Avec Jérémie Renier en tête d’affiche, Albatros, le dernier film de Xavier Beauvois, était attendu avec impatience au Festival du film francophone d’Angoulême où il était présenté en avant-première. Une histoire poignante à voir au cinéma le 3 novembre prochain.
Pour son nouveau long-métrage, Xavier Beauvois a voulu filmer la mer. Il campe son intrigue à Étretat où l’on suit un gendarme dans son travail et dans l’intimité de sa famille. Laurent est un commandant de brigade respecté et apprécié. Jusqu’au jour où sa vie est bouleversée par un accident : alors qu’il cherche à raisonner un agriculteur sur le point de se suicider, il le tue.
D’un jeu intense et habité, Jérémie Renier interprète cet homme tourmenté qui va devoir vivre avec un traumatisme qui reflète la difficulté et l’exigence de son métier mais aussi une impuissance certaine face à la misère sociale en ruralité. Sans en faire un manifeste sur la crise du monde agricole, Xavier Beauvois ancre son film dans la société d’aujourd’hui. Il témoigne de la complexité d’une situation nouée de toute part en prenant le point de vue des forces de l’ordre dont il met en valeur l’importance du travail de proximité.
Dans une ambiance froide et grave, Albatros saisi directement l’attention du spectateur. D’une manière intelligente, il laisse le cœur du film, l’évènement tragique, venir tardivement pour en donner toute l’intensité. Séparant ainsi l’histoire en deux parties distinctes, il fournit le cadre et les ressorts du drame sans que rien ne soit laissé au hasard, avant de nous plonger dans l’émotivité du choc et de cheminer doucement avec son personnage jusqu’à la fin du film.
Il doit son atmosphère réussie au décor normand et à sa météo instable. Xavier Beauvois filme la mer dans ses troubles et sa solitude, l’exploitant autant comme ressource visuelle que scénaristique. La terre apparait alors comme allégorie de la stabilité, participant à créer une dichotomie entre avant et après l’accident. Parfois un peu trop en longueur, il reste un long-métrage bien construit et prenant.
Avec son drame Albatros, Xavier Beauvois nous montre aussi bien des scènes de joie que des scènes horribles. Il a ce don de pouvoir passer si rapidement de l'un à l'autre. Il met d'abord en scène des tranches de vie, celle de Laurent, un gendarme incarné par Jérémie Rénier. Une vie professionnelle entre cambriolages, ivrognes, déminage et discussions plus ou moins légères entre collègues, avec, parfois, quelques touches d'humour qui nous font sourire... Le tout présenté avec beaucoup de réalisme. Le soucis du détail est bel et bien présent, notamment dans cette scène de préparation d'arme par le gendarme ou encore dans celle d'un bateau en pleine tempête qui donne aussi le mal de mer au spectateur.
Lorsque que survient le tournant du film, à savoir quand Laurent tue par accident un agriculteur (la toute première fois qu'il utilisait son arme de service), une heure après le début de l'histoire, on a l'impression de basculer dans un autre long-métrage. Le film devient plus lent, paraissant plus long et un peu moins intéressant. Comme son personnage principal, qui est complètement anéanti par son geste et devient mutique, le film perd quelque peu de sa vie, sa flamme. C'est dommage car la première partie du film est très agréable à regarder.
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