mercredi 17 mars 2021

Livre - Tropique du Cancer - Le Colosse de Maroussi - Henry Miller

 


"Ceci n'est pas un livre... C'est une insulte sans fin, un crachat à la face de l'art, un coup de pied aux fesses de Dieu, à la Destinée, l'Amour, la Beauté..." En quelques phrases, Henry Miller a tout dit. Écrit à Paris, Tropique du Cancer défie toutes les lois sages de la littérature. L'œuvre, autobiographique, se veut autant un exercice de libération que d'affirmation de soi de l'écrivain, qui s'y livre tout entier, au fil de ses années vécues en France, où il est arrivé en 1929. À travers impressions et souvenirs, c'est l'existence parisienne de Miller qui jaillit des rues, des hôtels, des cafés de Montparnasse ou de Clichy, des brèves rencontres, des amours furtives, des discussions, des beuveries avec des écrivains et des artistes: un souffle de vraie vie passe, frémissante, conjuguée sur le mode de l'expérience la plus intime, et ponctuée de moments de misère et de faim, de découragement et de solitude. Célébré par Cendrars, Tropique du Cancer fut publié en France grâce aux efforts d'Anaïs Nin, qui en signa la préface. Il fut d'abord interdit aux États-Unis, où, outre sa facture déroutante, on lui reprocha de miner les fondements mêmes de l'édifice social, de pervertir la jeunesse par son obscénité, son apologie des maisons closes et du sexe, et le recours abondant aux mots les plus crus. Il ne fut publié outre-Atlantique qu'en 1961. Vendu à plus d'un million d'exemplaires, le livre suscita aussitôt une soixantaine de procès pour pornographie. Suivi de Tropique du Capricorne, en 1938, il marqua profondément toute une génération d'écrivains - celle des Kerouac, des Ginsberg, des Mailer.


Henry Miller ou le picaro du Zen (1980 / France Culture)

J'avais marché les yeux bandés, à pas chancelants, hésitants ; j'étais orgueilleux, arrogant, satisfait de mener la vie fausse et restreinte du citadin; la lumière de la Grèce m'a ouvert les yeux, a pénétré mes pores, a fait se dilater mon être tout entier.
J'ai retrouvé ma patrie; le monde avec le centre véritable, la signification réelle de la révolution. Aucun conflit guerrier entre les nations de la terre ne saurait troubler cet équilibre... Je refuse catégoriquement toute qualité, dans l'avenir, qui serait inférieure à ce titre de citoyen du monde que je me suis décerné en silence, debout dans le tombeau d'Agamemnon.


En 1970, Henry Miller raconte sa vie d'écrivain et les aléas de son existence

 


 Henry Valentine Miller 1891-1980 est un romancier, essayiste, épistolier, peintre aquarelliste américain. Son oeuvre est largement autobiographique.

Né de parents d'origine allemande (fils d'un modeste tailleur), il est un enfant de Brooklyn, et plus particulièrement de la rue dont il fait son domaine.

Après de brèves études au City College de NewYork, il exerce divers petits métiers (notamment chef des coursiers à la Western Union Telegraph Company).

En 1923, il épouse June Edith Smith (rencontrée dans un dance palace de Broadway), la seule femme qui compta dans sa vie (bien qu'il se fût marié cinq fois), et celle qui hante la plupart de son œuvre, la Mona-Mara des "Tropiques" et de "La Crucifixion en rose" (1949).

Au cours de cette union qui dura sept ans, Miller, incapable de supporter la moindre contrainte extérieure, autodidacte absolu, fait le serment de ne se consacrer qu'exclusivement à la littérature et s'établit, dès 1930, à Paris, où, pendant dix années, il mène la vie de bohème évoquée dans trois romans autobiographiques, "Tropique du Cancer" (1934), publié grâce à la contribution d'Anaïs Nin, "Printemps noir" (1936) et "Tropique du Capricorne" (1939).

Jugés pornographiques, ces ouvrages furent interdits de publication aux États-Unis mais circulèrent clandestinement et contribuèrent à donner à leur auteur une réputation d'avant-gardiste.

Il fuit la guerre en 1940 et retourne vivre dans son pays natal où des voyages et rencontres lui inspirent quelques ouvrages parfois férocement satiriques sur la civilisation américaine ("Le cauchemar climatisé", 1945 ; "Souvenir souvenirs", 1947), « qui n’a abouti qu’à créer un désert spirituel et culturel ».

Farouche combattant du puritanisme anglo-saxon, il écrit la trilogie "La Crucifixion en rose" : "Sexus" (1949), "Nexus" (1952), "Plexus" (1960). Ses prises de position ont contribué à faire évoluer la société américaine et occidentale dans son ensemble, en même temps qu’elles lui permettaient de forger sa propre légende. Son œuvre, très autobiographique, a considérablement marqué son époque, et influencé les écrivains de la Beat Generation.

Miller était également un honorable pianiste amateur. En dehors de l'écriture romanesque proprement dite, il entretint d'abondantes correspondances avec nombre d'écrivains, artistes et autres personnalités de son temps.

 

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