Sous le titre « Par notre faute », les éditions utovie viennent de publier cinq textes inédits (ou peu connus) de l'incomparable Henri Guillemin, dont la libre et décapante parole nous manque beaucoup aujourd'hui...
...laissant de côté ses réflexions sur "l'Eglise et la foi", je m'attacherai à rendre compte d'un texte intitulé "Ma conviction profonde", publié en 1963 suite à sa lecture au micro de la radio suisse romande. Patrick Berthier, l'excellent biographe d'Henri Guillemin, qui a établi l'édition de ce petit livre, fait justement remarquer le décalage entre ce qui a été dit sur les ondes et les pages imprimées que l'on peut lire ; aussi tiendrais-je compte de ces remarques pour ma propre analyse.
La première phrase de cette "confession" d'un juste rejoint évidemment ce qui m'étreint fondamentalement au crépuscule de ma vie : "Peut-on vivre sans une idée précise de ce qu'est la vie, du sens que ça peut avoir, cette course à la mort ?...La plupart des hommes vivent leur vie comme s'ils ne se rendaient pas compte, absolument pas compte, de l'affaire dans laquelle ils sont pris et qui débouche infailliblement sur ce trou, pour eux, dans la terre."
Mais il n'y a aucun pessimisme dans ce constat puisque "l'homme n'est pas perdu dans un monde sur lequel son esprit a le pouvoir".
Et Guillemin fait l'éloge du développement de la pensée scientifique heureusement fécondée par les réflexions de Teilhard de Chardin préfigurées par Jaurès ainsi que par "l'idée directrice" de Claude Bernard : "L'univers, dans une évolution passionnée, remonte à l'amour qui en est la source".
Ce chrétien récuse l'Eglise et ses dogmes, qui "portent le poids d'un héritage terrible" ; il dit que "les valeurs humaines se rencontrent chez les non-chrétiens ...car la lave sort par des volcans neufs quand l'ancien cratère est bouché."
Voilà pourquoi cet homme éminent (que j'ai rencontré en 1967) est devenu l'ami de l'athée que je suis. Et ce vigoureux iconoclaste de la bien-pensance des "honnêtes gens", littéraire, philosophe et historien, m'a montré la voie...
"Tout homme qui aime la Connaissance pour de bon, qui se voue à la Connaissance, qui pense à autre chose qu'à des chaires, des prix, des croix ou des fauteuils, je me sens plus proche de lui que de ces "croyants" par convenance sociale ou souci d'assurance pour l'au-delà, comme il en fourmille, hélas ! Et l'homme qui lutte pour un ordre juste, pour la destruction des accaparements et pour la fin des oppressions, c'est lui mon meilleur camarade."
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