dimanche 11 avril 2021

Livre - Poésies - Monsieur Teste - Paul Valéry


 «La bêtise n'est pas mon fort.» Le narrateur, qui commence par cette affirmation, est un homme qui a vécu. Il aurait pu être valablement célèbre. Mais, dit-il, «je me suis préféré». Il rêve «que les têtes les plus fortes, les inventeurs les plus sagaces, les connaisseurs le plus exactement de la pensée devaient être des inconnus, des avares, des hommes qui meurent sans avouer.» Monsieur Teste, qu'il rencontre dans un café, est un de ces héros silencieux. 

 

 

 

 

 

Paul VALÉRY – Un siècle d'écrivains : 1871-1945 (DOCUMENTAIRE, 1997)

 


L'amateur de poèmes SI je regarde tout à coup ma véritable pensée, je ne me console pas de devoir subir cette parole intérieure sans personne et sans origine ; ces figures éphémères ; et cette infinité d'entreprises interrompues par leur propre facilité, qui se transforment l'une dans l'autre, sans que rien ne change avec elles. Incohérente sans le paraître, nulle instantanément comme elle est spontanée, la pensée, par sa nature, manque de style. MAIS je n'ai pas tous les jours la puissance de proposer à mon attention quelques êtres nécessaires, ni de feindre les obstacles spirituels qui formeraient une apparence de commencement, de plénitude et de fin, au lieu de mon insupportable fuite. UN poème est une durée, pendant laquelle, lecteur, je respire une loi qui fut préparée ; je donne mon souffle et les machines de ma voix ; ou seulement leur pouvoir, qui se concilie avec le silence. JE m'abandonne à l'adorable allure : lire, vivre où mènent les mots. Leur apparition est écrite. Leurs sonorités concertées. Leur ébranlement se compose, d'après une méditation antérieure, et ils se précipiteront en groupes magnifiques ou purs, dans la résonance. Même mes étonnements sont assurés : ils sont cachés d'avance, et font partie du nombre. MU par l'écriture fatale, et si le mètre toujours futur enchaîne sans retour ma mémoire, je ressens chaque parole dans toute sa force, pour l'avoir indéfiniment attendue. Cette mesure qui me transporte et que je colore, me garde du vrai et du faux. Ni le doute ne me divise, ni la raison ne me travaille. Nul hasard, mais une chance extraordinaire se fortifie. Je trouve sans effort le langage de ce bonheur ; et je pense par artifice, une pensée toute certaine, merveilleusement prévoyante, ? aux lacunes calculées, sans ténèbres involontaires, dont le mouvement me commande et la quantité me comble : une pensée singulièrement achevée.

 

Une Vie, une œuvre : Paul Valéry, sans faux-col (1871-1945)


Paul Valéry 1871-1945 est un écrivain, poète, philosophe et épistémologue français.
Fils d'une génoise et d'un corse, il entame, en 1876, ses études chez les dominicains à Sète, puis au collège de Sète et poursuit sa formation, de 1884 à 1888, au lycée de Montpellier.
En 1889, il débute des études de droit et publie ses premiers vers dans la Revue maritime de Marseille. A cette époque, sa poésie est dans la mouvance symboliste. En 1890, sa rencontre avec Pierre Louÿs est déterminante pour l'orientation de sa vie de poète. Ce dernier lui présente André Gide et l'introduit dans le cercle étroit de Stéphane Mallarmé, dont il restera un ami fidèle.
En 1892, à Gênes, Valéry passe par une crise existentielle. Il décide de consacrer l'essentiel de son existence à ce qu'il appelle "la vie de l'esprit". En 1894, il s'installe à Paris où il se lie avec Paul Léautaud et devient rédacteur au ministère de la Guerre. En 1900, il épouse Jeannie Gobillard dont il aura trois enfants.
Paul Valéry a laissé une oeuvre considérable parmi laquelle on trouve des écrits poétiques ("Le Cimetière marin" (1920), "Charmes" (1922)...), des essais littéraires, artistiques et philosophiques ("Variété I, II, III, IV, V" (1924-1944)...).
Sous l'Occupation, Paul Valéry, refusant de collaborer, prononce en sa qualité de secrétaire de l'Académie française l'éloge funèbre du « juif Henri Bergson ». Cette prise de position lui vaut de perdre ce poste, comme celui d’administrateur du Centre universitaire de Nice (Centre universitaire méditerranéen).
Il est également connu comme traducteur en vers ("Les Bucoliques" de Virgile) et apprécié pour ses préfaces critiques ("Lucien Leuwen" de Stendhal, "Les Chimères" de Nerval, "Lettres persanes" de Montesquieu).
Paul Valéry a été inhumé au cimetière marin de Sète après des funérailles nationales. 

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