« Écrivons, nom d’un pétard ! Ficelons nos phrases, serrons-les comme des andouilles et des carottes de tabac. Masturbons le vieil art jusque dans le plus profond de ses jointures. Il faut que tout en pète, monsieur. »
Le Gueuloir réunit les principales fulgurances glanées dans la correspondance de Gustave Flaubert. Les femmes, les bourgeois, les gens de lettres, l’art, la morale, la politique, la religion : en grand pourfendeur de la bêtise, l’Excessif (tel qu’il aimait à se surnommer lui-même) n’épargne personne. Ripailleur et tonitruant, il se montre tout autant épris d’absolu et sensible jusqu’à la mélancolie : « Notre vie tourne ainsi continuellement dans la même série de misères, comme un écureuil dans une cage, et nous haletons à chaque degré. »
Compilation percutante d’une correspondance réputée pour sa drôlerie et son intelligence, le Gueuloir constitue l’opportunité de redécouvrir sous un angle inédit l’auteur de Madame Bovary et du Dictionnaire des idées reçues.
Cette correspondance demeure un modèle de filiation littéraire entre Flaubert qui est déjà célèbre et Maupassant qui ne le deviendra qu'à la mort de Flaubert avec « Boule de suif ». Cette correspondance croisée entre les deux écrivains montre un Flaubert dont l'oeuvre est déjà accomplie, mais encore en plein travail sur Bouvard et Pécuchet et Maupassant en devenir, accompagné par celui qu'il appelle « maître ».
Jacques Weber au gueuloir !
Flaubert était tempétueux, gueulard, mais toutes ses lettres se terminaient par un mot d'amour. Cet enfermement qu'était le sien dans une littérature devant être la plus pure possible, était-ce une forme de protection ? Car derrière cette armature, un coeur palpite et dégouline d'amour et de désir.
Jacques Weber, comédien, réalisateur, scénariste et écrivain
L'homme de la pureté absolue ?
On a fait à Flaubert des procès qu’on peut tout à fait trouver légitimes comme la misogynie, la grossièreté… Je crois que c’est une première couleur, une première lecture. J'ai découvert Flaubert comme comédien puisque c’est un auteur qui m’a un jour proposé la correspondance, que je ne connaissais pas. Dans un premier temps, j’étais fasciné par la possibilité multi-protéiforme, Flaubert disait de lui-même "Je suis un ornement de marqueterie", il y avait une liberté dévergondée, et pour le jeu c’était très agréable. Puis plus je l’ai relu plus je me suis rendu compte qu’il y avait des fils tendus très profonds, philosophiques, discrets, élégants. La plupart de sa correspondance se termine toujours par une dernière tendresse. Après avoir été tempétueux, violent, gueulard, il y a toujours une grosse tendresse de gros labrador ou une phrase d’amour, il était capable d’appeler Tourgueniev "mon amour", c’est un homme des extrêmes, et c’est peut-être parce qu’il est l’homme des extrêmes qu’il est aussi l’homme de la pureté absolue.
Lettres lues par Jacques Weber :
- Lettre à Ernest Chevalier, 15 mars 1842, Rouen, dans La Pléiade, tome 1
- Lettre à Louis Bouilhet, 1er décembre 1849, Le Caire, et Post-scriptum du 4 décembre 1849, dans La Pléiade tome 1 (avec une musique de l'Ensemble Ganoub, Icaat)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire