L'histoire du K, qui donne son titre au recueil, contient tous les thèmes familiers à Dino Buzzati, l'auteur du
Désert des Tartares, et définit parfaitement un art où le merveilleux et l'humour se mêlent à l'observation lucide avec une maîtrise que confirment les cinquante autres récits suivants. Une sensibilité exacerbée, un sens aigu de la justice, un certain pessimisme aussi donnent une résonnance poignante au Compte, à la Petite Circé, à L'Ascenseur, au Veston ensorcelé, par exemple. Le fantastique de Buzzati est étroitement accordé à l'air de notre temps et aux préoccupations du jour : la guerre mondiale, la dictature, le mal de la jeunesse et la solitude, comme en témoignent Chasseurs de vieux, La Leçon de 1980 ou Suicide au parc et L'Arme secrète.
Journaliste, Dino Buzzati avait le sens de la formule, la capacité d'écrire court, un don pour la chute... Satiriste, il faisait son miel des faits divers, qui lui inspiraient des contes cruels, mêlant réalisme, anticipation à court terme et insolite... Son fantastique, métaphore des travers humains, nous offre une image dérisoire du pouvoir, de l'argent, des honneurs... Buzzati dépeint fréquemment des hommes qui, trop tard, découvrent qu'ils sont passés à côté de l'essentiel, tel le personnage de Et si ?, qui s'aperçoit qu'il a négligé l'amour. Dans Le K, le récit qui donne son nom au recueil, un jeune garçon renonce à devenir marin de peur que le K, un monstre qui le pourchasse, ne le dévore. Il lui faudra attendre une ultime confrontation pour réaliser qu'il lui offrait fortune, puissance et bonheur ! En quelques dizaines de nouvelles, souvent féroces, Buzzati brosse un tableau douloureux de la condition humaine, heureusement tempéré par une distance et un humour qui en font un écrivain attachant.
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