« Tout est possible, même Dieu ! » Ainsi s’exprime Renan à la fin de sa vie. Ce n’est pas un retour à la religion de son enfance, qu’il a définitivement abandonnée à l’âge de vingt-deux ans, ni la résignation du sceptique qu’il n’a jamais été, mais l’affirmation de sa croyance : le monde a un sens, il faut travailler à sa perfection. Érudit et savant hors pair, prosateur élégant, philosophe à ses heures, Ernest Renan, après avoir été la gloire de la République militante et le maître à penser de plusieurs générations, est aujourd’hui oublié. À l’heure où s’effondrent tant de certitudes idéologiques, et où tant de valeurs s’effritent sur le marché, il est temps de le redécouvrir. C’est à quoi nous invite cet essai. Sur maintes questions encore à l’ordre du jour — la science, la religion, l’islam, la nation, la République, l’Allemagne, l’éducation — la pensée de Renan est étonnamment actuelle.
Actualité d'Ernest Renan
Je suis heureux, mes chers auditeurs, mes chères auditrices, de vous retrouver pour cette 17e saison de « Concordance des temps » dont votre fidélité soutient la longévité. Nous allons l’inaugurer en parlant ce matin de l’actualité d’Ernest Renan. Ce peut être une tentation de la trouver un peu chétive, cent vingt trois ans après sa mort, en contraste avec l’immense notoriété dont a joui de son vivant et longtemps encore après, comme savant et comme écrivain, cet homme dont Anatole France disait, peu après ses éclatantes funérailles nationales, qu’il avait été (rien de moins !) « l’un des plus vastes génies de son temps, la plus grande lumière du XIXe siècle », « la probité de son esprit égalant la vigueur de son intelligence ». Certes, il apparaît que la postérité ne réserve plus cette place à Renan aujourd’hui, mais dans le même temps son souvenir resurgit souvent quand on débat – est-il rien de plus actuel ? – des relations entre l’Église et l’État, entre la foi et la raison, entre les différentes civilisations. Et surtout il est une référence à laquelle il est fait toujours appel, au cœur du questionnement si prégnant par les temps qui courent, sur la crise supposée de la nation en face de toutes les formes de la mondialisation. Il l’a définie, cette nation, dans une conférence célèbre, d’une manière qui n’a rien perdu de sa pertinence et de sa force.
Philippe Barret , docteur en science politique, inspecteur général de l’Éducation nationale, a consacré jadis à Ernest Renan un livre qui garde sa pleine valeur d’information et de réflexion. Il est donc mon invité. Jean-Noël Jeanneney
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