Entraîné par la malice du Diable, le saint homme Maël aborde une île des
mers hyperboréennes où l'a poussé une tempête de trente jours. Et là,
trompé par sa mauvaise vue, le vieil apôtre baptise des pingouins,
causant ainsi au Royaume des Cieux une perplexité dont Catherine
d'Alexandrie tire heureusement les élus en proposant de métamorphoser
les pingouins en hommes. Telle est l'origine la plus reculée de la
civilisation pingouine dont Anatole France raconte l'évolution jusqu'à
nos jours dans ce récit où sa verve féroce fustige les ambitieux et les
politiciens de son temps : le temps de Boulanger ou de l'affaire
Dreyfus. On y trouve un Pyrot compromis dans la sombre affaire des
bottes de foin, un Colomban qui rappelle beaucoup Zola. Cette satire
pessimiste est douée d'une pérennité qui fait penser à Swift et à
Voltaire. Elle est écrite dans un style limpide où étincelle l'ironie de
celui que jean Guéhenno a appelé le « dernier sage ».
Source : Le Livre de Poche, LGF
Bibliothèque numérique romande:
France Anatole – L’Île des Pingouins : L’Île des Pingouins existe ! Si !
Si !… Elle est située quelques kilomètres au sud-est de l’Île des
Cochons : cela ne s’invente pas… Elle fait partie, comme cette dernière,
de l’archipel des Crozet, quelque part du côté de l’Antarctique…
Mais Anatole France n’a cure ni de l’une, ni de l’autre. Son Île des
Pingouins à lui est une extraordinaire allégorie historico-satirique, et
si vous y débarquez, le temps de la parcourir, en suivant les tours et
les détours de cette héneaurme parodie burlesque et féroce, acide et
pittoresque, vous aurez tout compris de l’Histoire de France passée,
présente et future.
Et s’il est vrai que « les historiens se copient les uns les autres,
s’épargnent ainsi de la fatigue et évitent de paraître outrecuidants »,
Anatole France, lui, fait preuve ici d’une grande originalité et son
style efficace et précis vous procurera tout au long de votre lecture un
plaisir vraiment jubilatoire.
Actualité d'Anatole France
Sa célébrité a été hors de pair, saluée en 1921 par le prix Nobel de littérature. Or voici qu’à un siècle de distance, Anatole France est pratiquement ignoré des nouvelles générations. On demeure sidéré par une telle déconfiture.
Cette émission s’est attachée souvent à restituer à des auteurs jadis largement répandus mais désormais négligés l’actualité qui peut être la leur, tout en s’efforçant de comprendre les motifs de l’effacement plus ou moins complet dont leur œuvre peut souffrir. Dans le cas d’Anatole France, qui est notre personnage de ce matin, le contraste est d’une grande violence. Au tournant des XIXe et XXe siècles, ses livres ont connu un succès immense, chez nous et à l’étranger. Sa célébrité a été hors de pair, saluée en 1921 par le prix Nobel de littérature. Son œuvre demeure omniprésente dans les bibliothèques privées de l’époque. Sa disparition, en 1924, causa une grande émotion.
Or voici qu’en dépit des efforts, souvent admirables, de spécialistes enthousiastes (je pense spécialement à Marie-Claire Bancquart, sa biographe et éditrice dans la collection de la Pléiade), voici qu’à un siècle de distance il est pratiquement ignoré des nouvelles générations. Et quand bien même on est habitué, dans le Panthéon des écrivains, aux flux et reflux des destins posthumes, on demeure quelque peu sidéré, dans le cas d’Anatole France, par une telle déconfiture de sa gloire. Que celle-ci soit injuste, c’est ce que nous allons nous efforcer de démontrer, tout en tâchant de la comprendre, avec l’aide de la compétence éminente de Laurent Theis, historien éprouvé des sensibilités politiques et littéraires de ces temps-là. Jean-Noël Jeanneney
Programmation sonore :
- Interview d’Anatole France enregistrée en 1923, diffusée en 1948 dans l’émission "La radio écrit l’histoire" sur Paris Inter.
- Extrait de Le livre de mon ami d’Anatole France (1885), lu par Claude Dominique dans l’émission "Le passé singulier" de Michel Winock, sur France inter, le 19 novembre 1984.
- Extrait de Les désirs de Jean Servier d’Anatole France (1882), lu par Claude Dominique dans l’émission "Le passé singulier" de Michel Winock, sur France inter, le 21 novembre 1984.
- Extrait de L’Île aux pingouins d’Anatole France (1908), lu par Henri Crémieux dans l’émission "Analyse spectrale de l’Occident" de Pierre Sipriot, le 17 juin 1967.
Bibliographie :
- Marie-Claire Bancquart, Anatole France. Un sceptique passionné, Calmann-Lévy, 1984.
- Anatole France (3 volumes), Pléiade, Gallimard, 1987, édition établie, présentée et annotée par Marie-Claire Bancquart.
- Marie-Claire Bancquart, Anatole France, Julliard, 1994.
- Guillaume Métayer, Anatole France et le nationalisme littéraire ? Scepticisme et tradition, Le félin, 2011.
- Jacques Suffel, Anatole France par lui-même, Seuil, 1957.
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