L'œuvre de Grégoire de Narek est un paradoxe. Si son nom est
universellement connu, son œuvre l'est peu, et pour cause : les
traductions ont été assez tardives, à l'exception du Livres des Prières,
publié en 1961 dans la collection Sources Chrétiennes des éditions du
Cerf, peu accessible au grand public. Dédiée aux martyrs du génocide de
1915, la publication du Trésor des Fêtes, Hymnes et Odes correspond
certes à une volonté mémorielle, dont le danger consiste à occulter la
valeur intrinsèque de l'œuvre, poétique et philosophique, qui seule en
fait un objet de lecture aujourd'hui et maintenant, par-delà les
siècles.
Écrite il y a 1 200 ans environ, l'œuvre de Narek dans toutes ses
parties procède d'une démarche originale que reprendra un millénaire
plus tard la littérature surréaliste: utiliser le langage poétique pour
libérer la parole intérieure de tous les canons des expressions
canoniques, normée par la tradition philosophique ou religieuse de son
temps. Formé par éducation aux poètes et philosophes grecs, dépositaire
de la poésie religieuse hébraïque (voir son Commentaire sur Le Cantique
des Cantiques), plongé dans les débats théologiques de son temps (il
sera excommunié de l'Église arménienne pour chalcédonisme), il dénoue
les fils de ce triple héritage pour les renouer avec la langue
intérieure, celle qui ne répond, par définition, à aucune règle connue,
si ce n'est le flot continu des sentiments que les mots ne parviennent à
circonscrire qu'au prix d'un déferlement continu.
Après la Syrie d´Éphrem, nous atteignons l´Arménie de Grégoire de Narek,
après le IVe siècle, nous voilà en l´an mil. Grégoire, que le pape
François a déclaré docteur de l´Église en 2015, est un poète et
mystique, qui a passé sa vie à quelque pas du lac Van, dans le monastère
de Narek. Une vie insignifiante en apparence, mais qui a produite l´une
des oeuvres les plus belles de toute la littérature d´Arménie, et osons
le dire, de toute la littérature mondiale. Regis Burnet vous propose
donc de partir à la découverte de Grégoire de Narek, en compagnie de son
meilleur connaisseur en français, Jean-Pierre Mahé, orientaliste,
philologue, historien du Caucase, et spécialiste des études arméniennes.
La Foi prise au Mot du 09/12/2018.
Saint Grégoire de Narek. C'est la décision qu'a prise le pape François
d'allonger la liste de ces saints qui, de façon éminente, ont contribué à
approfondir la théologie et la doctrine de l'Eglise. A l'occasion de
cette déclaration faisant de Grégoire de Narek un nouveau Docteur de
l'Eglise, le dimanche 12 avril 2015, "La foi prise au Mot" revient sur
la vie et les écrits de ce moine arménien de l'an mil, dont l'oeuvre fut
si importante. Pourquoi donc a-t-il été fait Docteur de l'Église ? Dans
quel contexte vivait-il ? Quelles furent sa vie et son oeuvre ? Quelle
est son influence aujourd'hui ? Pour mieux nous le faire découvrir, deux
invités, grands connaisseurs du saint arménien, viennent nous éclairer :
Philippe Sukiasyan, diacre de l'Église apostolique arménienne, et
Jean-Pierre Mahé, membre de l'Institut, philologue et historien du
Caucase, spécialiste des études arméniennes.
La Foi prise au Mot du 19/04/2015.
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